
Noël en Provence : 13 desserts et 3 nappes
Qui ne connait pas cette tradition des 13 desserts servis en Provence le soir de la veillée de Noël ….
Sauf que qui sait vraiment d’où vient cette tradition, et pourquoi 13 desserts ?
J’étais cet après-midi, en famille, au Château de l’Aumérade (à Pierrefeu-du-Var), pour assister au spectacle de Noël : les contes d’Alphonse Daudet. Nous avons été accueilli dans un cadre magnifique et très chaleureusement, comme chez nous. Et la tradition était respectée !!!
Les 12 apôtres et le Christ
Les 13 desserts ou « calenos » (du provençal caleno = repas de Noël) sont traditionnellement servis après le gros souper, lors de la vigile de Noël dans les familles provençales. Cette tradition remonterait au 17ème siècle au moins. En 1683 précisément, François Marchetti, curé d’une paroisse de Marseille, les cite dans son ouvrage « Explications des usages et coutumes des Marseillais », sans toutefois en donner le nombre. Il y avait alors dans cette période, profusion de mets et de desserts, à une époque où l’on mangeait beaucoup plus simplement quotidiennement. C’était une tradition d’abondance et de réjouissance, pour fêter Noël.
Les desserts sont décrits comme nombreux, savoureux et empreints de douceur, mais point de nombre ! Les fruits secs, frais et la pompe à huile apparaissent dans le récit et aussi la présence de 3 nappes blanches qui recouvrent la table du repas (symbole de la Trinité) et de 13 pains représentant les 12 apôtres et le Christ.
D’autres auteurs depuis ont également écrit sur cette tradition en citant notamment parmi les 13 desserts : les figues, les prunes de Brignoles, les raisins secs et frais, les pommes, les poires, les oranges, les cédrats confits, les biscuits et les nougats entre autres. Mais toujours pas de nombre et de liste exacte.

Une légende pas si vieille que ça …
C’est à la fin du 19ème siècle, que les félibres et leur chef, Frédéric Mistral (membres du Félibrige = association œuvrant pour la sauvegarde, la promotion de la langue, de la culture et de l’identité des pays de langue d’oc), citent les mémorables fêtes calendales de Marseille, et parlent des « noix, châtaignes, poires, amandes, vin cuit, les oreillettes, la fougasse et le dernier melon un peu ridé » comme de « friandises exquises ».
La première mention des treize desserts n’apparaît qu’en 1925, dans le journal La Pignato, où le docteur Jospeh Fallen, majoral du Félibrige, affirme qu’il en faut 13, pas plus, pas moins. Au début des années 1930, le Musée du Terroir Marseillais consacre une salle au repas de Noël, la tradition s’ancre et se codifie. La légende des 13 desserts est née !
Comment constituer sa table gourmande ?
C’est pas moins de 50 à 60 desserts qui sont répertoriés et servis à Noël sur les tables provençales. Selon la région, le canton, la ville et même la famille, la liste varie avec quelques « piliers » cependant : la pompe à huile, la fougasse à la fleur d’oranger, les 4 mendiants – figue, amande, noix, raisin sec – représentant les ordres religieux – franciscains, carmes, augustins, dominicains -, les pommes, poires, melon vert, oranges, mandarines, cédrats, sorbes et raisins frais, les pâtes de coing, ou d’autres fruits, les confitures (celle de pastèque est excellente !), les dattes, les bugnes, les oreillettes, les calissons, les nougats (noir, blanc et rouge), les chocolats en tout genre, les navettes, les biscuits au fenouil et au cumin, le vin cuit et vin muscat….
De quoi régaler vos papilles en choisissant 13 douceurs parmi cette liste non exhaustive, pour perpétuer la tradition du Noël en Provence.
Et pour aller jusqu’au bout de la coutume, il faut que chaque convive goûte à chaque met, pour s’assurer chance et bonheur et que les plats restent 3 jours sur la table. De quoi faire durer le plaisir des sens…
Comme je ne veux pas vous laisser acheter ces délices en supermarché (le marketing s’étant emparé depuis longtemps de toutes ces spécialités), je vous livre quelques adresses authentiques, pour déguster les vraies spécialités d’ici (liens vers les boutiques en ligne, allez-y, c’est délicieux !).
Les Nougats Fouque, depuis 1864, à Signes (Var)
La Maison Jonquier, confiserie et nougats depuis 1885, à Ollioules (Var)
Les Calissons du Roy René, depuis 1920, à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône)
La Confiserie et Chocolaterie Florian, depuis 1920, à Nice (Alpes-Maritimes)
Bon bout d’an et à l’an qué ven !
AK

